Pour une fois, Emilia sortait de cher elle, non pas avec un grand sourire, mais avec une simple impression de soulagement. Comme tous les mardi, elle avait rendez vous avec Mademoiselle Benovic, une charmante psychologue mais qui affichait toujours un sourire figé sur son visage. Ca lui donnait un petit côté hypocrite. Mais ce n'était pas réellement ça qui mettait mal à l'aise tous les mardi Emilia. Ce n'était pas les questions parfois un peu trop intimes que Madame Bénovic lui posait. Ce n'était pas les longs silences qui s'en suivaient, ce n'était pas le fait qu'elle sache que cette charmante Madame trompait honteusement son mari ni le fait d'être prise pour une jeune fille mentalement instable. C'était le regard de pitié et humide que ses parents lui jetaient dans la salle d'attente. Parfois même elle pouvait percevoir leur déception de voir leur seule et unique fille être dans un tel état.
Mais aujourd'hui, elle n'aurait a subir, du moins, elle l'espérait que les questions et l'expression figée de sa psychologue.
Ses parents avaient accepté de la laisser seule. Ils devaient assister à un gallas ou plusieurs récompenses étaient discernées. Des récompenses de quoi, ça, la jeune fille n'aurait su le dire. Et à vrai dire, ça lui passait un peu au dessus. Depuis que la réputation de folle du quartier était tombé sur leur fille, les parents Carter avaient redoublés d'efforts pour faire bonne figure auprès des voisins. Visiblement ça marchait plutôt bien...
Quoi qu'il en soit, voilà Emilia marchant tête baissée sur le trottoir, habitude qu'elle avait prise, histoire d'avoir le moins de contact possibles avec autrui. Sauf qu'elle n'avait pas prévu le surgissement d'un petit bout de bonne femme qui sortait de la boulangerie devant laquelle Emilia passait juste à ce moment là. La collision fut inévitable. Et bien sur les conséquences qui allèrent avec. Un "pardon" envoyé à la va vite pour la dame et une vision pour la jeune fille.
Se figeant sur place, Emilia ferma les yeux dans l'espoir que ce qu'elle venait de voir ne soit, comme l'affirmait Madame Benovic, une simple hallucination de son esprit perturbé. Se retournant vivement, elle regarda la dame qui envoyait un dernier salut de la main au boulanger. Elle était sur le point de traverser. Un peu plus loin, une voiture grise, La voiture grise, s'engageait dans la rue.
Le premier réflexe de la jeune fille fut de penser qu'elle n'avait rien à voir la dedans. C'était le destin qui voulait ça, elle n'avait pas à interférer. Elle éviterait ainsi des remerciements interminables et des poignées de mains reconnaissantes mais ô combien gênantes. Mais qu'est ce quel racontait ?! Ce qu'elle venait de voir était complètement faux. Ce n'était qu'un de ses délires qui revenaient. Elle était folle. Tout le monde le lui disait. Pourquoi ne les croirait elle pas ?
Et pourtant, tous les éléments étaient là. La voiture, la victime, l'environnement et elle. Elle regarderait. Juste par curiosité. Elle observerait la scène et pour peut être quelque part se prouver au moins à elle même qu'elle n'était pas si dingue que ça. Oui, mais si cela se produisait réellement, cette dame allait mourir. Elle ne supporterait pas le poids de nouveaux remords. Ca serait au dessus de ses forces.
Cette réflexion, Emilia la fit en une seconde et demie. Temps au bout du quel Emilia se jeta sur la dame qu'elle tira violemment sur le trottoir. La voiture n'eut le temps que de shooter son sac qui fit un vol plané. Quant à la dame, elle en fut déstabilisée et tomba a plat ventre juste devant la jeune fille.
La panique envahit alors Emilia. Elle ne voulait pas être reconnue, elle ne voulait pas croire que ce qu'elle avait vu quelques secondes plus tot s'était finalement réalisé, elle ne voulait pas être touché ou pire elle ne voulait pas être accusée à tord de violence. Sans demander son reste, elle se mit alors a courir pour fuir le lieu.
Ce qui était sur, c'est qu'elle n'en parlerais pas à Madame la psychologue.